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180 LR8 ORIGINES DU THÉÂTRE LYRIQUE MODERNE.

il se divertit même à des farces aristo-phanesqu.es. Il se déguise en jeune fille pour exciter les sens d'un vieil amoureux (1). Ces rôles sont surtout curieux par la satire effrénée de tout ce qui est respectable ou respecté. Page et Nourrice ne cessent de railler amèrement l'amour, la noblesse, la cour et les courtisans,

— au Palais Royal même (2). Parfois la critique littéraire s'ajoute à la satire sociale, et le Page de la Parlenope de Stampiglia, fait le procès du mélodrame, dont il qualifie la manière, àHdropico stile altisonoro (3).

Ainsi l'esprit populaire se faisait jour dans la comédie musi- cale de Florence, Venise et Naples (4).

Etait-il tout entier là, dans cette raillerie libertine et sceptique ?

— Certes le sens du burlesque et la joyeuse moquerie des ridicules a toujours été un des traits du génie italien. On le retrouve jus- qu'en ses plus parfaits artistes, Léonard et Raphaël. Mais enfin ce n'en était qu'un trait, et il n'aurait pas suffi à faire les Joconde

��(1) Io so che non son cosa Ne vaga ne vezzosa ;

Perô son fanciulletta e tenerella, Non ho gran polpa addosso, Non son nemmen tutt'osso, Ma son cosi cosi rosecarella.

{Eraclea, II, 11.)

(2) FAice, 1680. — Cet esprit bourgeois et frondeur se répand dans toute l'Italie. Le vieux fonds provincial se réveille. Bontempi, de Pérouse, pré- sente, dans son Paride de 1662 (voir chapitre suivant), un précepteur qui reproche à deux jeunes nobles leur ignorance; ils le prennent de très haut :

Hirseno : Je t'abandonne toute science, tout art : tu peux prendre ma part. Etudier! à quoi me servirait-il, à moi qui suis noble? Toi qui es un manant (ignobile), c'est ton devoir d'étudier; étudie donc, maestro; bonsoir.

Medoro (le précepteur, resté seul) : « Etudier, à quoi bon, moi qui suis noble! » — Oh! la généreuse pensée! O Ciel! ô Dieu! Donc, parmi nous, celui qui aura reçu du ciel l'héritage de la noblesse devra mépriser celui qui possède la vertu!... etc. Non, il n'est pas noble, qui méprise la vertu..., etc. (Acte V, scène 4 et 5.)

(3) Partenope, I, 11.

(4) A Rome même, la bouffonnerie s'était fait une place dans l'opéra. Pippo Acciajuoli faisait représenter ses mélodrames un peu gras (« gras- setti »); sans parler de son Givello , drama musicale burlesco , musique de Melani et Stradella, joué en 1670 à Florence, en 1672 à Sienne, en 1675 à Modène, en 1676 à Reggio, en 1682 à Venise. — Fêtes gastronomico-comico- musicales du card. Chigi en 1668 (voir Adcmollo).

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