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192 LES ORIGINES DU THEATRE LYRIQUE MODERNE.

tous deux la nuit; fou de jalousie, il blesse son ami d'un coup de pistolet. Stellidaura défend Armidoro, et, s'emparant d'une ôpée, veut continuer la lutte, qu'Orismondo refuse, sans se faire con- naître. Armidoro découvre par ses.domestiques le nom de l'agres- seur; partagé entre l'indignation et l'ancienne amitié, il se venge du roi, en le torturant de jalousie, au récit de son bonheur (1). Cependant Stellidaura, instruite de son côté, veut prévenir les nouveaux projets meurtriers d'Orismondo; elle se déguise en homme, pénètre sous un masque dans le palais, surprend le tyran pendant son sommeil, et lève l'épée sur lui. Armidoro survient, et sauve son ami. Il ne reconnaît point sa maîtresse, qui refuse de se nommer; et, sur son propre conseil, Orismondo la con- damne à mort. Stellidaura se soumet, elle boit le poison ; mais on se doute bien que ce n'est qu'un narcotique (2). — Cependant on la reconnaît; Orismondo la fait ensevelir dans les caveaux royaux, et c'est là que nous la retrouvons, avec son amant désespéré, soupirant les métaphores d'usage. « La lumière est éteinte, voici les lis changés en pâles violettes. » Il s'évanouit de douleur à la fin de son Aria. Stellidaura se réveille, et croit à son tour qu'Ar- midoro s'est tué. Elle court frapper Orismondo. Mais celui-ci vient d'apprendre que Stellidaura est sa sœur, et il la donne à Armidoro.

Parmi ces scènes, que j'ai simplifiées le plus possible, un pay- san calabrais, domestique du tyran et son sbire au besoin, pro- mène sa belle humeur poltronne et goguenarde, et fait assaut de finasseries avec le valet d'Armidoro. La nature joue son rôle ; la lune, les étoiles, les caveaux, les prisons, les changements fré- quents de décors, achèvent de disperser l'intérêt, et de donner l'idée d'un art très différent de celui de Florence et de Rome. La langue est des plus emphatiques, et il faut l'admirable musique de Provenzale pour donner du naturel et de la profondeur aux passions.

L'Esclave de sa femme est sans doute aussi de Perrucci ; mais la pièce est plus intéressante ; il y a plus de finesse dans le dialogue

��(1) Ici, l'erreur de deux laquais, porteurs de messages d'amour, amène les habituelles complications de dépit amoureux.

(2) Les âmes sensibles du public italien veulent bien encore assister au spectacle de la mort, mais à la condition de n'y pas croire, ou d'être dé- trompées tout de suite. Dans Lu Caduta de Decemviri de Scarlatti et Stam- piglia, pour ne pas les affliger, Virginius ne tue pas Virginia; ce n'est qu'une égratignure; elle épouse à la fin son fiancé Icilius. — Se rappelle-t-on YŒdipe de Sacchini ?

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