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234 LES ORIGINES DU THÉÂTRE LYRIQUE MODERNE.

J. Dorât écrit un éloge « in Orlandum Lassusium, praestantis- simum numerorum musicorum auctorem (J). » Ronsard adore la musique, « et principalement aimoit à chanter et à ouyr chanter ses vers, appelant la musique sœur puisnée de la poésie, et les poètes et musiciens enfans sacrez des Muses, que sans la musique la poésie estoit presque sans grâce, comme la musique sans la mélodie des vers inanimée et sans vie (2). » Un de ses meilleurs amis est le célèbre musicien de ballets d'Henri IV et Louis XIII, Jacques Mauduit (3). — Mais le plus intéressant de la Pléiade est, à notre point de vue, Jean-Antoine de Baïf (4). Son nom s'associe à une tentative sur laquelle il nous faut insister plus longuement : la création d'une véritable Académie de poésie et musique. Dès la

��Nos vers, au ciel, aux coins de la terre, sans peur De ce qui fit en mer choir le fils de Dédale.

Mesme l'air des beaux chants inspirez dans les vers, Sst comme en un beau corps une belle ame infuse.

11 ne fait seulement les Dieux se sentir dieux,

Mais les hommes il fait, par une éprise extrême

Se sentir tels, que font ces dieux mesme en leurs cieux.

Son àme (à Orlande) , que je cuide, alla des cieux tirant Tous les tons plus parfaits, tant que mesme il égale L'accord meilleur que font ces cieux en se virant. Etc..

(1)

At nunc Orlandus doctis sic cantibus omnes Humani affectus exprimit ingenii, Ejus ut in modulis non res per carmina tantùm Quaeque cani, praesens sed videatur agi.

(J. Dorât, Thresor de Musique d'Orlande, 1594.)

(2) Vie de Ronsard, par Claude Binet. — Ronsard dit, dans son Abrégé de l'Art poétique, qu'on doit « s'attacher à faire les vers plus propres à la musique et accord des instruments, en faveur desquels il semble que la poésie soit née , car la poésie sans les instruments ou sans la grâce d'une ou plusieurs voix n'est nullement agréable, non plus que les instruments sans estre animez de la mélodie d'une plaisante voix. » (1565.)

(3) Jacques Mauduit, de Paris, 1557-1627. — Il écrivit la musique funèbre pour les obsèques de Ronsard. « Le service, mis en musique nombrée par le sieur Mauduit, l'un de ses meilleurs amis, animé de toutes sortes d'ins- truments, fut chanté par l'eslite de tous les enfants des Muses, s'y estans trouvé ceux de la musique du roy suyvant son commandement, et qui re- gretta à bon escient le trespas d'un si grand personnage, ornement de son royaume..., etc. » (Binet.)

(4) Baïf, comme Charles IX, était un demi-Italien, un Vénitien par sa mère. Fils naturel, comme on sait, de Lazare de Baïf, il était né à Venise en février 1532. Voir sur ses tentatives musicales, le livre de M. Fremy : V Académie des derniers Valois. E.Leroux, 1887.

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