Michel-Ange, étonné, le regarda, et s’excusa aussitôt, avec une grande courtoisie :
— Pardonnez, messer Francesco ; en vérité, je ne vous avais pas remarqué, parce que je n’avais d’yeux que pour la marquise.
Cependant Vittoria, après une petite pause, commença, avec un art qu’on ne pouvait assez vanter, à parler de mille choses, d’une façon adroite et discrète, sans toucher à la peinture. On eût dit quelqu’un qui assiège une ville forte, avec peine et avec art ; et Michel-Ange avait l’air d’un assiégé vigilant et défiant, qui met ici des postes, qui lève là les ponts, qui place ailleurs des mines, et qui tient la garnison en éveil aux portes et sur les murs. Mais enfin, la marquise l’emporta. Et vraiment, personne n’aurait pu se défendre d’elle.
— Allons, — dit-elle, — il faut bien reconnaître qu’on est toujours vaincu, quand on attaque Michel-Ange avec ses propres armes, c’est-à-dire avec la ruse. Il faudra, messer Lattanzio, que nous parlions avec lui de procès, de brefs du pape, ou bien… de peinture, si nous voulons le réduire au silence, et avoir le dernier mot.
Ce détour ingénieux amène la conversation sur le terrain de l’art. Vittoria entretient Michel-Ange d’une construction pieuse, qu’elle a le projet d’élever ; et aussitôt Michel-Ange s’offre à examiner l’emplacement, pour ébaucher un plan.