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LE FILLEUL

Et qu’à l’envi recueillent nos savants.
Pour celui-ci je demande un sourire.
J’ai mis, rêveur, quelque amour à l’écrire ;
Il me semblait y sentir palpiter,
Sous l’ironie amère et le caprice,
L’âme d’un temps affamé de justice,
Et qu’il ne faut mépriser ni vanter.

C’était le temps où le peuple de France
Dormait encor du sommeil de l’enfance,
Et, de ses maux pour alléger le poids,
Parait son front de rustiques guirlandes
Et se berçait de contes, de légendes,
Tout en rêvant, à l’ombre de la croix.
On respectait les prêtres et les rois ;
Mais aux tyrans, à leur sceptre, à leur glaive,
On échappait doucement par le rêve.
Parfois aussi le bon sens du maraud
Épouvantait qui l’observait d’en haut.
On agitait, parmi ces spectres blêmes
Que décimait la faim, de grands problèmes :
Au tribunal de l’humaine raison
Ils citaient Dieu lui-même à comparaître ;
Ils se plaignaient de lui-même au Grand-Être,
Et l’accusaient. En dépit du blason,
Le serf, courbé sous le joug de son maître,