Page:Ronsard - Œuvres complètes, Garnier, 1923, tome 1.djvu/193

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I. LIVRE DES AMOURS 113 Par tes rayons à la poincte cornue, En ma faveur eusses rompu la Nuë, Faisant d’obscur un temps serein et beau. Va te cacher, vieil Pastoureau champestre : Ah ! tu n’es digne au Ciel d’estre un flambeau, Mais un qui meine en terre les bœufz paistre. MURET [ ?] Jaloux Soleil.) Il dit que le Soleil n’est digne de luire aux cieux, mais d’estre bouvier, comme autrefois il fut gardant les bœufs du Roy Admete sur le fleuve Amfrise en Thessalie, et que si le Soleil eust aimé autrefois, comme les poètes content, / eust eu pitié de luy, et eust appaisé le temps d’une belle clarté, afin que sa maistresse le fust venu voir. c Quand je vous voy, ou quand je pense en vous, D’une frisson tout le cœur me frétille, Mon sang s’esmeut, et d’un penser fertile Un autre croist, tant le suget m’est doux. Je tremble tout de nerfs et de genous : Comme la cire au feu, je me distile : Ma raison tombe, et ma force inutile Me laisse froid sans haleine et sans pous. Je semble au mort, qu’en la fosse on dévale, Tant je suis hâve, espoventable et pâle, Voyant mes sens par la mort se muer : Et toutefois je me plais en ma braise. D’un mesme mal l’un et l’autre est bien aise, Moy de mourir, et vous de me tuer. Ronsard. — Les Amours, t. I. S