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PIERRE DE RONSARD

gueil, qui anime encore pour nous des horizons familiers. Ce nom de Marie n’a-t-il été à l’origine qu’un écho de celui de Maria, que célébrait Manille ? une paysanne agréa-t-elle ou fit-elle languir les vives entreprises du gentilhomme ? Arrangés ou vrais, ces amours de peu de saisons, auxquelles ne manque même pas l’épisode de l’inconstance féminine, sont contées en des vers d’un tour vif et naturel, où se glissent de charmantes descriptions des occupations de la bienaimée et du pays qu’embellit sa grâce rustique. Elle avait quinze ans, et la fraîcheur d’une rose du matin, lorsqu’il la rencontra

Aux jardins de Bourgueil, près d’une eau solitaire.

Idéalisée par la mémoire du poète, la jeune Angevine mourut à la fleur de l’âge. C’est par ce triste destin qu’elle rejoignit, sur un point qui la distinguait de Cassandre, la glorieuse maîtresse de Pétrarque. Ronsard paraît imiter dans l’émotion sincère d’un souvenir les admirables sonnets In morte di Madonna Laura. Ceux qui pleurent la mort de Marie sont à peine moins parfaits que les italiens, et notre poésie en garde plusieurs parmi ses joyaux :

Comme on voit sur la branche au mois de mai la rose
En sa belle jeunesse, en sa première fleur,