Page:Ronsard - Œuvres complètes, Garnier, 1923, tome 1.djvu/93

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Rien ne me plaist sinon ce qui m’ennuye :
Je suis vaillant, et le cœur me défaut,
J’ay l’espoir bas, j’ay le courage haut,
Je doute Amour, et si je le desfie.
Plus je me pique, et plus je suis rétif,
J’aime estre libre, et veux estre captif,
Mon mal prend fin, et soudain recommence.
Un Promethée en passions je suis :
J’ose, je veux, je souhaite, et ne puis.
Ainsi la Parque a filé ma naissance.


MURET

J’espère et crain.) Il demonstre les contraires effets qu’Amour produit en luy : lesquels nul ne peut au vray entendre, qui ne les ait expérimentez en soy-mesme. Tel presque est un Sonet de Pétrarque, qui se commence Amor mi sprona in un tempo et affrena, Assecura, e spaventa, arde, et agghiaccia. Un Promethée.) C’est à dire, Mes passions renaissent perpétuellement, comme celles de Promethée : duquel les Poètes disent que pour avoir desrobé le feu du Ciel, il fut attaché à une montaigne de Scythie, nommée Caucase, là où un aigle luy rongeoit continuellement le foye : et afin que son torment fust perpétuel, il luy renaissoit de nuict autant de foye, comme l’aigle pinsetant luy en avoit dévoré par jour. Ainsi le raconte Pherecyde [de Leros. Voir Historicorum Graecorum fragmenta rec. C. et T. Muller (Paris, 1874), t. I.]


XIII

Pour estre seul tes beaux soleils aimant,
Non pour ravir leur divine estincelle,