Page:Ronsard - Choix de poésies, édition 1862, tome 1.djvu/248

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Fait éclater devant un président,
Et qui, piqué d'avarice suivante,
Franchit la mer de l'Inde à l'occident;


L'un de l'amour adore l'inconstance,
L'autre plus sain ne met l'esprit, sinon
Au bien public, aux choses d'importance,
Cherchant par peine un perdurable nom :


L'un fuit la cour et les faveurs ensemble,
Si que sa tête au ciel semble toucher :
L'autre les suit, et est mort ce lui semble.
S'il voit le roi de son toit approcher.


Le pèlerin à l'ombre se délasse,
Ou d'un sommeil le travail1 adoucit,
Ou réveillé, avec la pleine tasse,
Des jours d'été la longueur accourcit;


Qui devant l'aube accourt triste à la porte
Du conseiller, et là, faisant main tour,
Le sac au poing2 attend que monsieur sorte
Pour lui donner humblement le bonjour.


Ici cestuy3 de la sage nature
Les faits divers remâche en y pensant,
Et cestuy-là par la linéature4
Des mains, prédit le malheur menaçant.


L'un, allumant ses vains fourneaux, se fonde
Dessus la pierre incertaine5, et combien
Que l'invoqué Mercure6 ne réponde,
Soufle en deux mois le meilleur de son bien.


1 Travail, fatigue.
2 Le sac du procès. Que de sacs ! Il en a jusques aux jarretières ! (RACINE, Plaid.)
3 Cestuy : celui-ci.
4 La configuration et les lignes.
5 Pierre incertaine : pierre philosophale.
6 Mercure Trismégiste, dieu des alchimistes.