Page:Ronsard - Tableau chronologique des œuvres, Laumonier, 1911.djvu/108

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D’un drap mortuere voilée,
Tant qu’elle et la nuit étoilée
Ayent fait peur au plus hardi,
Qui, passant là le mécredi,
Vient de la Chartre, ou de la foire
De l’Avardin, ou de Montoire.

N’aCatin a mille inventions
De mille bigotations,
Quand la terre est la plus esprise
De froidure, elle en sa chemise
Masquant son nez de toile blanche
D’un gros caillou se bat la hanche,
L’estomac, les yeux et le front,
Ainsi comme l’on dit que font
Ceux qui sont maris de leur mere,
Ou ceux qui meurdrissent leur pere.
Expiant l’horrible forfait
Qu’innocemment ils avoyent fait.

N’aEt toutesfois cette insensée,
Ayant bani de sa pensée
Le souvenir d’avoir esté
L’exemple de mechanceté,
Ose bien prescher ma pucelle,
Pour la convertir ainsi qu’elle
A mille bigotations,
Dont elle a mille inventions.

N’aEt quoy (dit-elle) ma mignonne ?
Ce n’est pas une chose bonne
D’aymer ainsi les jouvenceaux :
Amour est un goufre de maux,
Amour affole le plus sage,
Amour n’est sinon qu’une rage,
Amour aveugle les raisons,
Amour renverse les maisons,
Amour honnist la renommée,
Amour n’est rien qu’une fumée