Page:Rosny - La Guerre du feu.djvu/125

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’affection qui leur était demandée. Ensuite, Naoh avait appris aux jeunes hommes comment il fallait habituer les géants à leur voix, si bien que, le cinquième jour, les mammouths accouraient au cri de Nam et de Gaw.

Les Oulhamr eurent un grand bonheur. Un soir, avant la fin du crépuscule, Naoh, ayant accumulé des branches et des herbes sèches, osa y mettre le Feu. L’air était frais, assez sec, la brise très lente. Et la flamme avait crû, d’abord noire de fumée, puis pure, grondante et couleur d’aurore.

De toutes parts, les mammouths accoururent. On voyait leurs grosses têtes s’avancer et leurs yeux luire d’inquiétude. Les nerveux barrissaient. Car ils connaissaient le Feu ! Ils l’avaient rencontré sur la savane et dans la forêt, quand la foudre s’était abattue ; il les avait poursuivis, avec des craquements épouvantables ; son haleine leur cuisait la chair, ses dents perçaient leur peau invulnérable ; les vieux se souvenaient de compagnons saisis par cette chose terrible et qui n’étaient plus revenus. Aussi considéraient-ils avec crainte et menace cette flamme autour de laquelle se tenaient les petites bêtes verticales.

Naoh, sentant leur déplaisir, se rendit auprès du grand mammouth et lui dit :

— Le Feu des Oulhamr ne peut pas fuir ; il ne peut pas croître à travers les plantes ; il ne peut pas se jeter sur les mammouths. Naoh l’a emprisonné dans un sol où il ne trouverait aucune nourriture.

Le colosse, emmené à dix pas de la flamme, la contemplait, et, plus curieux que ses semblables, pénétré aussi d’une confiance obscure en voyant ses faibles amis si tranquilles, il se rassura. Comme son agitation ou son calme réglaient, depuis de longues années, l’agitation et le calme du troupeau, tous, peu à peu, ne redoutèrent