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VI

Les ferromagnétaux

Deux heures avant l’aube, Targ se retrouva dans la plaine, au bord de la crevasse où avait débuté son voyage au pays des ombres. Affreusement las, il contemplait, au fond de l’horizon, la lune écarlate, pareille à une fournaise ronde et prête à s’éteindre. Elle disparut. Dans la nuit immense, les étoiles se ranimèrent.

Alors, le veilleur voulut se remettre en route. Ses jambes semblaient de pierre, ses épaules s’affaissaient douloureusement et, par tout son corps, passait une telle langueur qu’il se laissa choir sur un bloc… Les paupières entrecloses, il revécut les heures qu’il venait de passer dans les abîmes. Le retour avait été épouvantable. Malgré qu’il eût pris soin d’accumuler les traces de son passage, il s’était égaré. Puis, déjà épuisé par les efforts précédents, il avait failli s’évanouir. Le temps semblait d’une longueur incommensurable ; Targ était comme un mineur qui aurait passé de longs mois dans la terre cruelle…

Tout de même, le voici revenu sur la surface où vivent encore ses frères, voici les astres qui, à travers les âges, exaltèrent les rêves de l’homme ; bientôt, l’aube divine va reparaître dans l’étendue