Page:Rosny aîné - Nymphée - Le Lion, 1909.djvu/41

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j’ai parlé… la récompense est trop grande. »

Elle m’épie de ses beaux yeux frais, et toujours grandit le sortilège.

« Trop grande ? »

Voilà qu’elle rougit. Pour moi, mon souffle va si vite que, toute une minute, ma voix se perd. Comment oserais-je lui dire ? Et si je parle, et si j’ai parlé pour la nuit ? Si c’est le refus ? Si jamais ces mains ne doivent étreindre les miennes, si ces lèvres rouges ?… Doutes âpres, doutes puissants, comme ils contractèrent mon être ! Je pus parler enfin :

« Oui … trop grande… votre remerciement payerait tous les périls et tous les dévouements !… »

Elle cessa de me regarder. La lèvre craintive sur la pâleur des dents, Sabine fut ma destinée même, elle résuma la Vie et Le Nirvana en ses grands cils abaissés. Je dis avec tremblement :

« Mon dévouement vous fait peur ?