Page:Rostand - Cyrano de Bergerac.djvu/204

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Roxane, qui les entend chuchoter.

Elle essaie de vous convertir !

Sœur Marthe.

Elle essaie de vous convertir !Je m’en garde !

Cyrano.

Tiens, c’est vrai ! Vous toujours si saintement bavarde,
Vous ne me prêchez pas ? c’est étonnant, ceci !…

(Avec une fureur bouffonne.)

Sabre de bois ! Je veux vous étonner aussi !
Tenez, je vous permets…

(Il a l’air de chercher une bonne taquinerie, et de la trouver.)

Tenez, je vous permets…Ah ! la chose est nouvelle ?…
De… de prier pour moi, ce soir, à la chapelle.

Roxane.

Oh ! oh !

Cyrano, riant.

Oh ! oh !Sœur Marthe est dans la stupéfaction !

Sœur Marthe, doucement.

Je n’ai pas attendu votre permission.

(Elle rentre.)

Cyrano, revenant à Roxane, penchée sur son métier.

Du diable si je peux jamais, tapisserie,
Voir ta fin !

Roxane.

Voir ta fin !J’attendais cette plaisanterie.

(À ce moment, un peu de brise fait tomber les feuilles.)

Cyrano.

Les feuilles !

Roxane, levant la tête, et regardant au loin, dans les allées.

Les feuilles !Elles sont d’un blond vénitien.
Regardez-les tomber.

Cyrano.

Regardez-les tomber.Comme elles tombent bien !
Dans ce trajet si court de la branche à la terre,
Comme elles savent mettre une beauté dernière,
Et malgré leur terreur de pourrir sur le sol,
Veulent que cette chute ait la grâce d’un vol !