Page:Rouleau - Légendes canadiennes tome I, 1930.djvu/23

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

bon vieux temps pour récréer ses petits amis, — s’il vous plaît ses grands amis : ce sont des finissants. Le père Martin se rendit avec plaisir à l’invitation ; son répertoire de légendes et de contes était aussi volumineux que l’ouvrage intitulé : Les mille et une nuits. Le narrateur commença donc ainsi son récit, qu’il assura être la pure vérité.

« Mes amis, vous vous rappelez sans doute l’année du grand choléra, cette année où l’épidémie asiatique fit tant de victimes à Québec. Ce fut en 1832. Toute la population était plongée dans la plus grande désolation et désertait la ville en foule pour échapper au terrible fléau. Trois pères de famille, dont les femmes et les enfants reposaient dans leur dernière demeure, au cimetière du Gros-Pin à Charlesbourg, montèrent un soir sur une frêle embarcation et partirent de Québec pour descendre à la Rivière-Ouelle. Une légère brise soufflait alors du sud-ouest, et la lune brillait dans tout son éclat. Le voyage promettait d’être des plus heureux. En effet, la nacelle glissa d’abord, pour ainsi dire, sur la plaine liquide et allait même toucher bientôt au terme de sa course, lorsque, rendus à la Traverse de Saint-Roch des Aulnaies, les nouveaux mariniers sont tout à coup assaillis par une furieuse tempête de vent de nord qui, dans l’espace de quelques minutes, se change en véritable ouragan. Le tonnerre gronde avec un fracas épouvantable ; les éclairs succèdent aux éclairs avec une rapidité vertigineuse ; le firmament présente