Page:Rousseau - Œuvres de J B Rousseau, nouvelle édition, Tome I, 1820.djvu/430

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Fremit de terreur ;
L’onde turbulente
Mugit de fureur ;
La lune sanglante
Recule d’horreur.

Dans le sein de la mort ses noirs enchantements[1]
Vont troubler le repos des ombres ;
Les mânes effrayés quittent leurs monuments ;
L’air retentit au loin de leurs longs hurlements ;
Et les vents, échappés de leurs cavernes sombres,
Mêlent à leurs clameurs d’horribles sifflements.
Inutiles efforts ! amante infortunée,
D’un Dieu plus fort que toi dépend ta destinée :
Tu peux faire trembler la terre sous tes pas,
Des enfers déchaînés allumer la colère ;
Mais tes fureurs ne feront pas
Ce que tes attraits n’ont pu faire.

  1. Dans le sein de la mort ses noirs enchantements, etc. Virgile lui-même
    n’a pas trouvé de touches plus fortes et plus vigoureuses
    pour peindre cette magicienne célèbre que le malheureuse Didon
    appelle à son secours, et dont l’art peut, à son gré :
    Sistere aquam fluvüs, et vertere sidera retro :
    Noctumosque ciet Manes : mugire videbis
    Sub pedibus terram, et descendere montibus ornos.
    (Eneid. iv, v. 489.)


    Sous ses pieds, tu verras s’ébranler les campagnes,
    Les pins déracinés descendre des montagnes ;
    L’onde arrêter son cours, l’Olympe ses flambeaux,
    Et les mânes sortir de la nuit des tombeaux.
    (Delille.)