Page:Rousseau - Œuvres et correspondance inédites éd. Streckeisen-Moultou.djvu/256

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dicte publique et à régler entre les particuliers les discus- sions d’intérêt, deux objetsqui devraient être les moindres de la législation dans un Ëtat bien constitué.

L’histoire ancienne est pleine de preuves de lattention du peuple aux mœurs des particuliers, et cette attention même en était la peine ou la récompense la plus sen* sible.

Les législateurs sanguinaires qui,àrexeniple deDracon^ ne savent que menacer et punir, ressemblent à ces mau- vais précepteurs qui n’élèvent les enfants que le fouet à la main.

Une chose qu’on ne peut assez admirer chez les pre- miers Romains, c’est que l’unique punition portée par les lois des Douze Tables contre les plus grands criminels était d’être en horreur à tous. On ne peiut même concevoir combien le peuple était vertueux qu’en songeant que la haine ou l’estime publique y était une peine ou une récom- pense dispensée par les lois.

Dans un État sagement policé, la loi pourrait dire comme la prêtresse Théano : « Je ne suis point ministre des dieux pour détester et maudire, mais pour louer et bénir. »

Les lois qui parlent sans cesse de punir et jamais de ré- compenser sont plus propres à contenir les scélérats qu’à