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DES INSTITUTIONS POLITIQUES. 245

Toutes les opérations qui se font sur les monnaies pour en fixer la valeur ne sont donc qu’imaginaires, ou, si elles produisent quelque effet réel, c’est seulement sur les ap- pointements annuels, sur les pensions et sur tous les paye- ments qui ne sont fixés que par des dénominations idéales de livres, de florins ou autres semblables. Ainsi, quand le prince hausse le prix des monnaies, c’est une fraude par laquelle il trompe ses créanciers, et, quand il le rabaisse, c est une autre fraude par laquelle il trompe ses débiteurs ; mais le prix de toutes les marchandises hausse ou baisse à proportioi^. de Taltération faite sur les monnaies ; le même rapport demeure toujours dans le commerce, entre le signe et la chose représentée. Ce que je dis ici de l’ar- gent monnayé se doit entendre également du prix du marc 4,*or ou d’argent fixé par édit public. Ce prix n’est que ce que le cours du commerce Ta fait être, et, malgré tous les édits, les mêmes variations s’y feront sentir, selon que les affaires vont bien ou mal.

Quoique l’argent n’ait par lui-même aucune valeur réelle, il en prend une, par convention tacite, dans chaque pays où il est en usage, et cette valeur varie selon le con- cours des causes qui servent à la délenniner. Ces causes peuvent se réduire à trois principales, savoir : 1® l’abon- dance ou la rareté de l’espèce ; 2* l’abondance ou la rareté des denrées ou autres marchandises ; 3* le degré de circu- lation qui dépend de la quantité des échanges, c’est-à-dire de la vigueur du commerce. Selon la manière dont ces trois choses se trouvent combinées dans un pays, l’argent y peut monter à un prix exorbitant ou retomber Jusqu’à rien, d’où il suit qu’un Ëlat peut se tiouver dans une telle situation, qu’avec une fort grande quantité d’argent il ne