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FRAGMENT BIOGRAPHIQUE

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Que de préjugés, d’erreurs et de maux je commençai d'apercevoir dans tout ce qui fait l'admiration des hommes! Cette vue me touchait de douleur et m'enflammait le courage. Je crus me sentir animé d’un plus beau zèle que celui de l'amour-propre, Je pris la plume et résolus de m’oublier moi-même ; j’en consacrai les productions au service de la vérité et de la vertu.

Je sens combien il est difficile de se garantir des illusions du cœur et de ne pas se donner le change à soi-même sur les motifs qui nous font agir. Je rends compte simplement de ce que j’ai cru sentir, sans affirmer que la vanité ne m’en imposât pas, mais j’ai toujours regardé comme peu dangereux tous les mouvements qui nous portent à des choses honnêtes et qui nous font faire avec plaisir ce que nous ferions également par les plus pures intentions.

Cette résolution semblait m’inspirer du génie et me donner une âme nouvelle : une vive persuasion qui dictait mes