Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t1.djvu/27

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ces ames énervées ou plutôt abruties sous la tyrannie, acquissent par degrés cette sévérité de mœurs & cette fierté de courage qui en firent enfin le plus respectable de tous les Peuples. J’aurois donc cherché pour ma Patrie une heureuse & tranquille République, dont l’ancienneté se perdît en quelque sorte dans la nuit des tems, qui n’eût éprouvé que des atteintes propres à manifester & affermir dans ses habitans le courage & l’amour de la Patrie, & où les Citoyens accoutumés de longue main à une sage indépendance, fussent non-seulement libres, mais dignes de l’être.

J’aurois voulu me choisir une Patrie, détournée par une heureuse impuissance du féroce amour des conquêtes, & garantie par une position encore plus heureuse de la crainte de devenir elle-même la conquête d’un autre État ; une ville libre, placée entre