Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t11.djvu/148

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nouveau crime & un nouveau ridicule. Je crois voir à la fois la raison de la demande & celle du refus. Ne pouvant trouver de refuge dans les plus solitaires retraites, chasse successivement du sein des montagnes & du milieu des lacs, forcé de fuir de lieu en lieu & d’errer sans cessé avec des peines & des dépenses excessives au milieu des dangers & des outrages, réduit à l’entrée de l’hiver à courir l’Europe pour y chercher un asyle sans plus savoir ou, & sûr d’avance de n’être laissé tranquille mille part, il étoit naturel que, battu fatigue de tant d’orages, il désirât de finir ses malheureux jours dans une paisible captivité, plutôt que de se voir dans sa vieillesse poursuivi chasse ballote sans relâche de tous cotes, prive d’une pierre pour y poser sa tête & d’un asyle ou il pût respirer, jusqu’à ce qu’à forcé de courses & de dépenses on l’eût réduit à périr de misère, ou à vivre, toujours errant des dures aumônes de ses persécuteurs ardens à en venir-la pour le rassasier enfin d’ignominie à leur aise. Pourquoi n’a-t-on pas consenti à cet expédient si sûr si court si facile qu’il proposoit lui -même & qu’il demandoit comme une saveur ? N’est-ce point qu’on ne vouloit pas le traiter avec tant de douceur ni lui laisser jamais trouver cette tranquillité si désirée ? N’est-ce point qu’on ne vouloir lui laisser aucun relâche ni le mettre dans un état ou l’on n’eût pu lui attribuer chaque jour de nouveaux crimes & de nouveaux livres. & ou peut-être à forcé de douceur & de patience eût -il fait perdre aux gens charges de sa garde les fausses idées qu’on vouloir donner de lui ? N’est-ce point enfin que dans le projet si chéri si suivi si bien concerte de l’envoyer en Angleterre, il entroit des