Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/165

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D’abord les mœurs, l’imposante image de la vertu devant laquelle tout fléchit, jusqu’au vice même ; ensuite l’ordre, la vigilance, enfin l’intérêt le dernier de tous ; j’ajouterois la vanité, mais l’état servile est trop près de la misere ; la vanité n’a sa grande force que sur les gens qui ont du pain.

Pour ne pas me répéter ici, permettez, Monsieur le Duc, que je vous renvoye à la cinquieme partie de l’Héloïse, Lettre dixieme. Vous y trouverez un recueil de maximes qui me paroissent fondamentales, pour donner dans une maison grande ou petite du ressort à l’autorité ; du reste je conviens de la difficulté de l’exécution, parce que, de tous les ordres d’hommes imaginables, celui des valets laisse le moins de prise pour le mener où l’on veut. Mais tous les raisonnemens du monde ne seront pas qu’une chose ne soit pas ce qu’elle est, que ce qui n’y est pas s’y trouve, que des valets ne soient pas des valets.

Le train d’un grand Seigneur est susceptible de plus & de moins, sans cesser d’être convenable. Je pars de-là pour établir ma premiere maxime.

1. Réduisez votre suite au moindre nombre de gens qu’il soit possible ; vous aurez moins d’ennemis, & vous en serez mieux servi. S’il y a dans votre maison un seul homme qui n’y soit pas nécessaire, il y est nuisible ; soyez-en sûr.

2. Mettez du choix dans ceux que vous garderez, & préférez de beaucoup un service exact à un service agréable. Ces gens qui applanissent tout devant leur maître, sont tous ces fripons. Sur-tout point de dissipateur.

3. Soumettez-les à la regle en toute chose, même au travail ce qu’ils seront dût-il n’être bon à rien.