Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/299

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rien moins qu’inutiles dans le Pays. Mais comme ces courses ont souvent pour objet des visites de femmes, quand on monte à cheval, ce qui commence à devenir rare, on y monte en jolis bas blancs bien tirés, & l’on fait à-peu-près pour courir la porte la même toilette que pour aller au bal. Aussi rien n’est si brillant que les chemins de la Suisse ; on y rencontre à tout moment de petits Messieurs & de belles Dames, on n’y voit que bled, verd,couleur de rose, on se croiroit au jardin du, Luxembourg.

Un effet de ce commerce est d’avoir presque ôté aux hommes le goût du vin, & un effet contraire de cette vie ambulante, est d’avoir cependant rendu les cabarets fréquens & bons dans toute la Suisse. Je ne sais pas pourquoi l’on vante tant ceux de France ; ils n’approchent surement pas. de ceux-ci. Il est vrai qu’il y fait très-cher vivre, mais cela est vrai aussi de la vie domestique, & cela ne sauroit être autrement dans un pays qui produit peu de denrées, & où l’argent ne laisse pas de circuler.

Les trois seules marchandises qui leur en aient fourni jusqu’ici sont les fromages, les chevaux & les hommes ; mais depuis l’introduction du luxe, ce commerce ne leur suffit plus, & ils y ont ajouté celui des manufactures dont ils sont redevables aux refugiés François, ressource qui cependant a plus d’apparence que de réalité ; car comme la cherté des denrées augmente avec les especes, & que la culture de la terre se néglige quand on gagne davantage à d’autres travaux, avec plus d’argent ils n’en sont pas plus riches ; ce qui se voit par la comparaison avec les Suisses catholiques, qui n’ayant pas la