Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/60

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grand avantage à l’affranchissement des Provinces-Unies qui lui coûtoient beaucoup à soutenir & le mettoient chaque jour à la veille d’une guerre qu’il redoutoit, ou à laquelle il aimoit mieux contribuer une fois avec tous les autres, afin de s’en délivrer pour toujours. Le Roi de Suède vouloit s’assurer de la Poméranie & mettre un pied dans l’Allemagne. L’Electeur Palatin, alors protestant & chef de la confession d’Augsbourg avoit des vues sur la Boheme & entroit dans toutes celles du Roi d’Angleterre. Les Princes d’Allemagne avoient à réprimer les usurpations de la Maison d’Autriche. Le Duc de Savoie obtenoit Milan & la couronne de Lombardie qu’il désiroit avec ardeur. Le Pape même fatigué de la tyrannie Espagnole étoit de la partie au moyen du Royaume de Naples qu’on lui avoit promis. Les Hollandois mieux payés que tous les autres gagnoient l’assurance de leur liberté. Enfin outre l’intérêt commun d’abaisser une Puissance orgueilleuse qui vouloit dominer par-tout, chacun en avoit un particulier, très-vif, très-sensible, & qui étoit point balancé par la crainte de substituer un tyran à l’autre, puisqu’il étoit convenu que les conquêtes seroient partagées entre tous les Alliés, excepté la France & l’Angleterre qui ne pouvoient rien garder pour elles. C’en étoit assez pour calmer les plus inquiets sur l’ambition de Henri IV : mais ce sage Prince n’ignoroit pas qu’en ne se réservant rien par ce traité, il y gagnoit pourtant plus qu’aucun autre ; car sans rien ajouter à son patrimoine, il lui suffisoit de diviser celui du seul plus puissant que lui, pour devenir le plus puissant lui-même ; & l’on voit très-clairement qu’en prenant toutes les précautions qui pouvoient assurer le succès