Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/81

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dernier résultat & doivent leur donner un prix que rien ne balance aux yeux du vrai citoyen. La première, que dans un travail commun, le mérite, les talens, l’intégrité, se feront plus aisément connoître & récompenser ; soit dans les membres des Conseils qui seront sans cesse sous les yeux les uns des autres & de tout l’Etat, soit dans le Royaume entier où nulles actions remarquables, nuls hommes dignes d’être distingués, ne peuvent se dérober long-tems aux regards d’une assemblée qui veut & peut tout voir, & où la jalousie & l’émulation des membres les porteront souvent à se faire des créatures qui effacent en mérite celles de leurs rivaux ; la seconde & dernière conséquence est que les honneurs & les emplois distribués avec plus d’équité & de raison, l’intérêt de l’Etat & du Prince mieux écouté dans les délibérations, les affaires mieux expédiées & le mérite plus honoré doivent nécessairement réveiller dans le cœur du Peuple, cet amour de la Patrie qui est le plus puissant ressort d’un sage gouvernement & qui ne s’éteint jamais chez les Citoyens que par la faute des Chefs.*

[* Il y a plus de ruse & de secret dans le Visirat, mais il y a plus de lumieres & de droiture dans la Synodie.]

Tels sont les effets nécessaires d’une forme de gouvernement qui force l’intérêt particulier à céder à l’intérêt général. La Polysynodie offre encore d’autres avantages qui donnent un nouveau prix à ceux-là. Des assemblées nombreuses & éclairées fourniront plus de lumières sur les expédiens ; & l’expérience confirme que les délibérations d’un Sénat sont en général plus sages & mieux digérées que celles d’un Visir. Les Rois seront plus instruits de leurs affaires ; ils ne sauraient