Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/98

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On peut, dit-il encore, faire passer le règlement de la Polysynodie en forme de loi fondamentale dans les Etats Généraux du Royaume, la faire jurer au sacre des Rois, & lui donner ainsi la même autorité qu’à la loi salique.

La plume tombe des mains, quand on voit un homme sensé proposer sérieusement de semblables expédiens.

Ne quittons point cette matiere sans jetter un coup-d’œil général sur les trois formes de ministère, comparées dans cet ouvrage.

Le Visirat est la dernière ressource d’un Etat défaillant ; c’est un palliatif quelquefois nécessaire qui peut lui rendre pour un tems une certaine vigueur apparente : mais il y a dans cette forme d’administration une multiplication de forces tout-à-fait superflue dans un Gouvernement sain. Le Monarque & le Visir sont deux machines exactement semblables dont l’une devient inutile si-tôt que l’autre est en mouvement : car en effet, selon le mot de Grotius : qui regit, rex est. Ainsi l’Etat supporte un double poids qui ne produit qu’un effet simple. Ajoutez à cela qu’une grande partie de la force du Visirat étant employée à rendre le Visir nécessaire & à le maintenir en place, est inutile ou nuisible à l’Etat. Aussi l’Abbé de St. Pierre appelle-t-il avec raison le Visirat une forme de Gouvernement grossière, barbare, pernicieuse aux Peuples, dangereuse pour les Rois, funeste aux Maisons royales, & l’on peut dire qu’il n’y a point de Gouvernement plus déplorable au monde, que celui où le Peuple est réduit à désirer un Visir. Quant au demi-Visirat, il est avantageux sous un Roi qui sait gouverner &