Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t13.djvu/541

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Avez-vous pu douter un instant, Madame la duchesse, que je n’eusse reçu avec autant d’empressement que de respect le livre des jardins Anglois que vous avez bien voulu penser à m’envoyer ? Quoique son plus grand prix fût venu pour moi de la main dont je l’aurois reçu, je n’ignore pas celui qu’il a par lui-même, puisqu’il est estimé & traduit dans ce pays, & d’ailleurs j’en dois aimer le sujet, ayant été le premier en terre-ferme à célébrer & faire connoître ces mêmes jardins. Mais celui de Bullstrode où toutes les richesses de la nature sont rassemblées & assorties avec autant de savoir que de goût, mériteroit bien un chantre particulier.

Pour faire une diversion de mon goût à mes occupations, je me suis proposé de faire des herbiers pour les naturalistes & amateurs qui voudront en acquérir. Le regne végétal, le plus riant des trois, & peut-être le plus riche, est très-négligé & presque oublié dans les cabinets d’histoire naturelle, où il devroit briller par préférence. J’ai pensé que de petits herbiers bien choisis & faits avec soin pourroient favoriser le goût de la botanique, & je vais travailler cet été à des collections que je mettrai, j’espere, en état d’être distribuées dans un an d’ici. Si par hasard il se trouvoit parmi vos connoissances quelqu’un qui voulût acquérir de pareils herbiers, je les servirois de mon mieux, & je continuerai de même s’ils sont contens de mes essais. Mais je souhaiterois particuliérement, Madame la duchesse, que vous m’honorassiez quelquefois de vos ordres, & de mériter toujours par des actes de mon zele, l’honneur que j’ai de vous appartenir.