Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t14.djvu/410

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’on lit dans ces copies, ne porte que sur quelques mots dont voici le plus essentiel. M. Rousseau dit à ce général : “lorsque je recevrai les bontés de Sa Majesté Britannique, je veux m’en honorer aux yeux du public comme aux miens, & n’avoir le cœur plein que des bontés de Sa Majesté & des vôtres. Je ne crains pas que cette façon de penser les puisse altérer.” Dans la feuille Angloise on lit : je ne crois pas. Cette locution est plus modeste, & par cela même plus convenable. Laissons ces innocentes fautes d’impression ; mais déduisons une chose essentielle de cette lettre. C’est que M. Rousseau étoit pénétré des bontés de Sa Majesté Britannique, & qu’il ne desiroit, pour les recevoir, que de les voir passer par d’autres mains que celles de M. Hume qu’il croyoit le trahir. Il n’est pas étonnant que l’historien Anglois n’ait pas narré cela au général Conway ; mais ce qui peut surprendre ; ce sont les réflexions de M. Hume & de ses conseillers.

“Quoique M. Rousseau paroisse faire ici le sacrifice d’un intérêt fort considérable, il faut observer cependant, que l’argent n’est pas toujours le principal mobile des actions humaines : il y a des hommes sur qui la vanité a un empire bien plus puissant, & c’est le cas de ce Philosophe. Un refus fait avec ostentation de la pension du Roi d’Angleterre, ostentation qu’il a souvent recherchée à l’égard d’autres Princes, auroit pu être seule un motif suffisant pour déterminer sa conduite.”

Il n’étoit pas possible que M. Hume & ses amis n’en connussent le principe naturel : celui d’ostentation qu’ils lui prêtent