Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t14.djvu/50

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cette foi stérile & glacée d’un esprit convaincu par la raison, à laquelle le cœur n’a point de part, & destituée également d’espérance & d’amour. Ce n’étoit point la foi morte de ces mauvais chrétiens qui vainement disent chaque jour, Seigneur, Seigneur, & n’entreront point dans le royaume des cieux. C’étoit cette foi pure & vive qui faisoit marcher les apôtres sur les eaux, & dont le Seigneur même a dit qu’un seul grain suffiroit pour ne rien trouver d’impossible. Elle étoit si ardente en son ame & si présente à sa mémoire, qu’il en faisoit régulièrement un acte au commencement de toutes ses actions, ou plutôt sa vie entiere n’a été qu’un acte de foi continuel, puisqu’on tient d’un témoignage assuré qu’il n’a jamais eu un seul instant de doute sur les vérités & les mysteres de la religion catholique. Et comment donc avec tant de soi n’a-t-il point opéré de miracles ? Chrétiens, Dieu vous doit-il compte de ses graces, & savez-vous jusqu’où peut aller l’humilité d’un juste ? Pourquoi demander des miracles ; n’en a-t-il pas fait un plus grand & plus édifiant que de transporter des montagnes ? Quel est donc ce miracle, me direz-vous ? La sainteté de sa vie dans un rang aussi sublime & dans un siecle aussi corrompu.

Le Duc d’Orléans croyoit ; & c’est assez dire. On peut s’étonner qu’il se trouve des hommes capables d’offenser un Dieu qu’ils savent être mort pour eux : mais qui s’étonnera jamais qu’un chrétien ait été humble, juste, tempérant, humain, charitable, & qu’il ait accompli à la lettre les préceptes d’une religion si pure, si sainte, & dont il étoit si intimement persuadé. Ah ! non, sans doute ; on ne remarquoit point entre ses