Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t14.djvu/54

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ardeur il montroit l’exemple, même sur ce point. Semblable à un enfant préféré, qui, pénétré d’une tendre reconnoissance, feuillete avec un plaisir mêlé de larmes le testament de son pere, il méditoit sans cesse nos Livres sacrés ; il y trouvoit sans celle de nouveaux motifs de bénir leur divin Auteur, & de s’attrister des liens terrestres qui le tenoient éloigné de lui. Il possédoit la sainte Ecriture mieux que personne au monde ; il en savoit toutes les langues, & en connoissoit tous les textes. Les commentaires qu’il a faits sur Saint-Paul & sur la Genese ne sont pas un témoignage moins certain de la justesse de sa critique & de la profondeur de son érudition, que de son zele pour la gloire de l’Esprit Saint qui a dicté ces livres, & la chaire de Professeur en langue Hébraïque qu’il a fondée en Sorbonne, n’y sera pas moins un monument des lumieres qui lui en ont fait appercevoir le besoin, que de la munificence chrétienne qui l’a porté à y pourvoir.

Mais à quoi sert d’entrer ici dans tous ces détails ? Ne nous suffit-il pas de savoir qu’il avait à ce haut degré une seule de ces vertus, pour être assurés qu’il les avoit toutes. Les vertus chrétiennes sont indivisibles comme le principe qui les produit. La foi, la charité, l’espérance, quand elles sont assez parfaites, s’excitent, se soutiennent mutuellement ; tout devient facile aux grandes ames avec la volonté de tout faire pour plaire à Dieu, & les rigueurs mêmes de la pénitence n’ont presque plus rien de pénible pour ceux qui savent en sentir la nécessité & en considérer le prix. Entreprendrai-je, Messieurs, de vous décrire les austérités qu’il exerçoit sur soi-même ? N’effrayons pas à ce point la mollesse de notre siecle. Ne