Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t14.djvu/545

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adversaire. C’est beaucoup dire, sa pleine justification, en supposant qu’il se portoit bien, & ce n’étoit rien dire de trop en convenant que sa maladie étoit manifeste. Dans le premier cas, il y a apparence que jamais Rousseau ne se fût brouillé avec M. Hume, pour des procédés indifférens, de nul intérêt, & qui n’attaquoient point l’honneur. Comme aliéné d’esprit, de quoi accuse-t-il M. Hume ? d’être un traître : comment le sait-il ? qui est-ce qui le lui a rapporté ? qu’il nomme l’accusateur, ou les témoins : il n’en fait rien, il ne produit que des soupçons il promet cependant des indices & des démonstrations, il ne tient pas parole : pour toute conviction, il fait parler un homme enséveli dans les bras du sommeil, à qui il fait dire je tiens J. J. Rousseau ; & après avoir tiré mille fausses conséquences de ces paroles, il termine trente-huit pages d’écriture par demander à l’accusé s’il est vrai qu’il l’a trahi ? & preuve qu’il n’en savoit rien, c’est qu’il confesse lui-même que, si cela n’est pas, il es le plus malheureux & le plus vil des hommes ; qu’il desire d’être cet objet méprisable, c’est-à-dire, de trouver M. Hume innocent, pour avoir le plaisir d’être prosterné devant lui, foulé à ses pieds, criant miséricorde, faisant tout pour l’obtenir, publiant à haute voix son indignité, & conclut par un paradoxe énigmatique, en disant, il n y a point d’objection dont un cour qui n’est pas né pour elle, ne puisse revenir. Je crois bien qu’un homme agité par les transports d’une maladie incurable peut s’égarer à ce point-là ; mais qu’un homme bien sain comme vous, mon cher confrere en belle prose, puisse en lisant tant ce folies ne pas s’appercevoir de l’aliénation de l’esprit de celui qui les a faites, c’est une de mes plus grandes surprises. Quoi !