Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t15.djvu/131

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Allons, M. R. mon cher M. R. un peu de philosophie chrétienne, un peu de courage encore. Vous ne finissez pas, je n’ai donc pas tout dit. Je ne veux que vos paroles pour vous en faire rougir salutairement, pour vous en faire demander pardon à Dieu, au Roi & aux François, à jamais déshonorés par vous, s’il étoit dit qu’en France on vient de Geneve pour prêcher tout cela impunément.

Votre Sauvage, dites-vous, est tel que “toute femme est bonne pour lui, que chacun y’attend l’impulsion de la nature, s’y livre sans choix, &c.” Ceux qui en ont voulu à M. R. & qui vouloient l’empêcher d’imprimer, se seroient moins bien vengés de lui, qu’en le laissant les venger lui-même. Je crois que c’est un service qu’ils ont rendu à la religion, à l’état, aux arts, aux sciences, à la société, à l’humanité, en lui laissant prêter sa plume à tous les esprits mécréans & dyscoles de l’univers.

Il se réfute, il les réfute lui-même en exposant au grand jour ce tas d’horreurs, d’inepties, de miseres qui se couvroient de fleurs & de mille beaux semblans sous les mains de nos beaux esprits, les Bayles, les ceci & les cela. M. R. est peut-être le seul qui ait pû dire tout cela sans rougir jusqu’ici.

J’exhorte les bons amis de M. R. s’il en a, d’en rougir salutairement pour lui & pour eux : s’ils sont François & chrétiens originaires, je crois qu’ils n’ont pas besoin d’y être exhortés. Le François n’est pas méchant dans le fond. Il ne l’est que jusqu’au petit mot, fin, ingénieux, badin. Il n’a point cette âpreté, cette suite de malice, cette constance de ne rougir de rien. Un mot, une épigramme, un vaudeville, il n’en