Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t15.djvu/216

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que les hommes sont par-tout les mêmes ; qu’ayant par-tout les mêmes passions & les mêmes vices, il es assez inutile de chercher à caractériser les différens peuples ; ce qui est à-peu-près aussi bien raisonné que si l’on disoit qu’on ne sauroit distingue Pierre d’avec Jaques, parce qu’ils ont tous deux un nez, une bouche & des yeux.”

Un de nos bons & grands Rois, disoit obligeamment à un de ses courtisans dont j’ai oublié le nom : un tel, je vous connois si fidele à mon service, si attaché à ma personne, que je ne crois pas que rien pût vous en détacher. Je vous demande pardon, Sire, répondit le courtisan, honnête-homme & loyal serviteur. Le mépris de votre Majesté me révolteroit à coup sûr. Le piquant de M. R. est qu’il nous méprise, & tous parle avec une incivilité, une impolitesse, qui est l’antipode de notre caractere, même avec lui.

Qu’est-ce que M. R. pour mépriser tout ce qui nous regarde ? Pour le moins, sommes - nous aussi en société avec lui, l’image de Dieu, & il n’a pas droit de cracher sur cette image qui est en nous, non plus que nous crachons sur celle qui est en lui, quoiqu’il ne cesse de l’avilir, en avilissant la nôtre.

L’orgueil cynique est le péché capital de l’orgueil ordinaire. Le crasseux Diogene, dans son tonneau plein de lie & d’ordure, méprisa plus Alexandre, qui l’y honoroit d’une visite, comme à la bête du jour, qu’Alexandre ne méprisoit l’univers, rois & peuples à qui il imposoit silence par-tout, dans le sein de sa gloire, & dans tout le brillant de son courage victorieux & conquérant.

M. R. connaît sort bien-tout le bas, le trivial, le suranné