Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t15.djvu/279

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ressentiment juste ou non, ce qu’on ne décide pas, fut au moins celui d’une ame noble : il ne se vengea de sa Patrie qu’en la servant. Il desiroit encore qu’elle existât avec toute la perfection de ses loix, lors même qu’elle ne devoit plus exister pour lui.

Ce fut aussi pour son pays qu’il écrivit sa lettre admirable sur les spectacles ; lettre d’une doctrine très-saine, fort applicable à un petit Etat constitué comme Geneve, mais qui ne sauroit l’être à tout Etat considérable où ce mal, devenu nécessaire, peut se convertir en un très-grand bien, parce que la vertu lorsqu’elle n’a plus le frein des mœurs publiques & privées, trouve alors un autre ressort, souvent efficace, dan l’honneur & l’élévation des sentimens ; chose à quoi le théâtre épuré est merveilleusement propre.

Je passe à d’autres écrits de Rousseau, sans m’attacher à leur ordre, les parcourant ici à mesure qu’ils se présentent sous ma plume.

On a dit assez généralement, dans le tems, que Jean-Jaques avoir dans son porte-feuille la correspondance d’un grande passion qu’il avoit éprouvée dans sa jeunesse, & qui avoit fait, par plus d’une cause, une époque marquée dans sa vie. Pour une ame de la nature de la sienne, de semblable impressions ne s’effacent plus. Le public sort occupé de lui pour lors, étoit dans l’enthousiasme du feu de ses productions. Echauffé à son tour par cette admiration générale, car rien ne répercute plus qu’un tel mouvement, il se complut à montrer à ce public épris la puissance de ses sensations dans celle des passions humaines qui les excitent le plus. Il y trouvoit