Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t15.djvu/337

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hommes à grand mérite ne consacrent pas toujours leurs talens à la patrie. On sait cela en France ; &, on s’en applaudit.

Ici M. Geoffroy abandonne le supplément à l’Emile ; crache en passant sur le supplément à la nouvelle Héloïse ; & arrive à des réflexions sur l’illustre Citoyen de Geneve, qu’il nous assure être plus, utiles que tout ce qu’il a dit sur ces fragmens ; & on le croit aisément jusqu’à ce qu’on les ait lues. Ces réflexions débutent par un parallele entre Voltaire & Rousseau. Ce sont incontestablement deux hommes ; & en voilà assez pour autoriser la comparaison : aussi n’y a-t-il que cela : car on ne peut regarder Rousseau comme un bel-esprit, ni Voltaire comme un grand génie. Quant à leur caractere moral, l’opposition est trop frappante pour qu’il faille en parler. Ce parallele est suivi d’un autre entre Rousseau, & le sincere, le désintéressé, le bon, le vertueux Séneque : on y trouve ces sentences remarquables.

Tous deux ont étonné leur siecle par des paradoxes ; mais les paradoxes de Séneque sont sublimes ; ceux de Rousseau sont bisarres. Les paradoxes de Séneque sont les chimeres de la vertu ; ceux de Rousseau ne sont que les boutades de la misanthropie. Séneque élevé l’homme jusqu’a Dieu ; Rousseau le ravale jusqu’à la bête.

On sont que moi, femme, je n’ai rien à répondre à cela ; & que c’est au public qui connoît les mœurs, & les ouvrages des deux Auteurs comparés, à qui il appartient de juger le juge.

Son caractere est encore un problême : les-uns le respectent comme un philosophe assez courageux pour dire à son siecle des vérités hardies, & nouvelles :