Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t15.djvu/39

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les deniers publics pour les jeux, les spectacles & les édifices, à attribuer des salaires aux citoyens pour les fonctions d’assister aux jeux & aux tribunaux, à détruire l’autorité du Sénat, à rendre la multitude toute-puissante, à entretenir enfin & à flatter tous ses caprices. Si je cherche quels furent les auteurs de cette corruption, l’Histoire me nomme Thémistocle, Ciron, Périclès ; en accuser Phidias, Euripide & Sourate, seroit le comble du ridicule.

L’orgueil naturel des Athéniens dégénéra en insolence & en indocilité ; leur vivacité devint : ivresse, & leur légèreté folie : ils s’épuiserent en, magnificences, & en guerres inutiles : ils eurent tous les vices du bonheur, & ils en firent toute les fautes : Athenes abusoit de tout, il falloit bien qu’elle abusât des arts comme elle avoir fait de sa puissance & de sa gloire, & qu’elle mît dans ses plaisirs les mêmes vices que dans ses affaires : elle avoit le bonheur de posséder Sourate, Platon, Xénophon, & elle écoutoit par préférence des sophistes & des déclamateurs qui la flattoient : elles ne se contentoit pas d’honorer, les Dieux & de couronner Euripide & Sophocle, elle se ruinoit follement pour ses temples & ses théâtres, & la poésie & la religion n’en étoient pas plus coupables l’une que l’autre : la licence d’une démocratie effrénée monta sur la scene : la comédie dès sa naissance fut obscene, impie & satirique, elle joua les noms & les visages, elle couvrit indifféremment de ridicules Hiperbolus & Sourate, elle ne tenoit pas ses vices de sa nature, puisqu’elle n’en a jamais eu de pareils chez aucun peuple ; elle ne fit que reporter dans les mœurs publiques la corruption qu’elle en avoit