Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t16.djvu/287

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y a plusieurs années que cet homme étoit faux, qu’il jouoit le sentiment, & sur-tout qu’il ne m’aimoit pas. Je me souvins de plusieurs petites anecdotes que m’avoient là-dessus racontées M. de F

[rancueil] & Mde. de C

[henonceau] x, qui ne l’estimoient ni l’un ni l’autre & qui devoient le connaître, puisque Mde. de C

[henonceau] x étoit fille de Mde. de R

[ochechouar] t, intime amie du feu comte de F

[ries] e, & que M. de F

[rancuei] l, très lié alors avec le vicomte de P

[oligna] c, avoit beaucoup vécu au palois royal, précisément quand G[...]commençoit à s’y introduire. Tout Paris fut instruit de son désespoir après la mort du Comte de F

[ries] e. Il s’agissoit de soutenir la réputation qu’il s’étoit donnée après les rigueurs de Mlle. de Fel, & dont j’aurois vu la forfanterie mieux que personne, si j’eusse alors été moins aveuglé. Il fallut l’entraîner à l’hôtel de Castries, où il joua dignement son rôle, livré à la plus mortelle affliction. Là, tous les matins il alloit dans le jardin pleurer à son aise, tenant sur ses yeux son mouchoir baigné de larmes, tant qu’il étoit en vue de l’hôtel ; mais au détour d’une certaine allée, des gens auxquels il ne songeoit pas le virent mettre à l’instant son mouchoir dans sa poche & tirer un livre. Cette observation qu’on répéta fut bientôt publique dans tout Paris, & presque aussitôt oubliée. Je l’avois oubliée moi-même, un fait qui me regardoit servit à me la rappeler. J’étois à l’extrémité dans mon lit, rue de Grenelle : il étoit à la campagne, il vint un matin me voir tout essoufflé, disant qu’il venoit d’arriver à l’instant même ; je sus un moment après