Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t16.djvu/321

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monde, ne pas me laisser un seul ami, ni petit ni grand. Que dis-je ! il ne falloit pas laisser percer un seul mot de vérité jusqu’à moi. Si un seul homme généreux me fût venu dire : Vous faites le vertueux, cependant voilà comme on vous traite, & voilà sur quoi l’on vous juge : qu’avez-vous à dire ? La vérité triomphoit, & G[...]étoit perdu. Il le savoit ; mais il a sondé son propre cœur, & n’a estimé les hommes que ce qu’ils valent. Je suis fâché, pour l’honneur de l’humanité, qu’il oit calculé si juste.

En marchant dans ces souterrains, ses pas, pour être sûrs, devoient être lents. Il y a douze ans qu’il suit son plan, & le plus difficile reste encore à faire : c’est d’abuser le public entier. Il y reste des yeux qui l’ont suivi de plus près qu’il ne pense. Il le craint, & n’ose encore exposer sa trame au grand jour.*

[*Depuis que ceci est écrit il a franchi le pas avec le plein, & le plus inconcevable succès. Je crois que c’est T.... qui lui en a donné le courage, & les moyens. ] mais il a trouvé le peu difficile moyen d’y faire entrer la puissance, & cette puissance dispose de moi. Soutenu de cet appui, il avance avec moins de risque. Les satellites de la puissance se piquant peu de droiture pour l’ordinaire, & beaucoup moins de franchise, il n’a plus guère à craindre l’indiscrétion de quelque homme de bien : Car il a besoin sur-tout que je sais environné de ténèbres impénétrables, & que son complot me soit toujours caché, sachant bien qu’avec quelque art qu’il en oit ourdi la trame, elle ne soutiendroit jamais mes regards. La grande adresse est de