Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t17.djvu/416

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Sauttershaim, s’il l’avoir connu. Je vois, par ce que vous me marquez de ses nouvelles bontés pour moi, qu’elles sont inépuisables, comme la générosité de son cœur. Ah ! pour-quoi faut-il que tant d’intermédiaires qui nous séparent, détournent & anéantissent tout l’effet de ses soins ? J’apprends que son trésorier qui m’a fait chasser du château de Trie à force d’intrigues, est en liaison avec l’agent du P. à celui de Lavagnac, & qu’il a déjà été question de moi entr’eux deux. Il ne m’en faut pas davantage pour juger d’avance du sort qu’on m’y prépare ; mais n’importe, me voilà prêt, & il n’y a rien que je n’endure plutôt que de mériter la disgrace du Prince, en me retractant sur ce que j’ai demandé moi-même, & en laissant inutiles par ma faute, les démarches qu’il veut bien faire en ma faveur. De tous les malheurs dont on a résolu de m’accabler jusqu’à ma dernière heure, il y en a un du moins dont je saurai me garantir quoiqu’on faire ; c’est celui de perdre sa bienveillance & sa protection par ma faute.

Vous avez la bonté, Monsieur, de me chercher une épinette. Voilà un soin dont je vous suis très - obligé, mais dont le succès m’embarrasseroit beaucoup ; car, avant d’avoir ladite épinette, il faudroit premièrement me pourvoir d’un lieu pour la placer, &... d’une pierre pour y poser ma tête. Mon herbier & mes livres de botanique me coûtent déjà beaucoup de peine & d’argent à transporter de gîte en gîte, & de cabaret en cabaret. Si nous ajoutions de surcroît une épinette, il faudroit donc y attacher des courroyes, afin que je pusse la porter sur mon dos, comme les Savoyardes