Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t2.djvu/186

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& plus vive, l’air plus pur, le Ciel plus serein ; le chant des oiseaux semble avoir plus de tendresse & de volupté ; le murmure des eaux inspire une langueur plus amoureuse, la vigne en fleurs exhale au loin de plus doux parfums ; un charme secret embellit tous les objets ou fascine mes sens ; on diroit que la terre se pare pour former à ton heureux amant un lit nuptial digne de la beauté qu’il adore & du feu qui le consume. Ô Julie ! ô chére & précieuse moitié de mon âme, hâtons-nous d’ajouter à ces ornemens du printems la présence de deux amant fideles : Portons le sentiment du plaisir dans des lieux qui n’en offrent qu’une vaine image ; allons animer toute la nature, elle est morte sans les feux de l’amour. Quoi ! trois jours d’attente ? trois jours encore ? Ivre d’amour, affamé de transports, j’attends ce moment tardif avec une douloureuse impatience. Ah ! qu’on seroit heureux si le Ciel ôtoit de la vie tous les ennuyeux intervalles qui séparent de pareils instans !

LETTRE XXIX. DE JULIE.

Tu n’as pas un sentiment, mon bon ami, que mon cœur ne partage ; mais ne me parle plus de plaisir tandis que des gens qui valent mieux que nous souffrent, gémissent, & que j’ai leur peine à me reprocher. Lis la lettre ci-jointe, & sois tranquille si tu le peux. Pour moi qui connois l’aimable & bonne fille qui l’a écrite, je n’ai pu la lire sans des larmes