Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t2.djvu/36

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de qui vit seul & n’en a pas en lui-même. On lit beaucoup plus de Romans dans les Provinces qu’à Paris, on en lit plus dans les Campagnes que dans les Villes, & ils y sont beaucoup plus d’impression : vous voyez pourquoi cela doit être.

Mais ces Livres qui pourroient servir à la fois d’amusement, d’instruction, de consolation au campagnard, malheureux seulement parce qu’il pense l’être, ne semblant faits au contraire que pour le rebuter de son état, en étendant & fortifiant le préjugé qui le lui rend méprisable ; les gens du bel air, les femmes à la mode, les Grands, les Militaires ; voilà les Acteurs de tous vos Romans. Le rafinement du goût des Villes, les maximes de la Cour, l’appareil du luxe, la morale Epicurienne ; voilà les leçons qu’ils prêchent & les préceptes qu’ils donnent. Le coloris de leurs fausses vertus ternit l’éclat des véritables ; le manege des procédés est substitué aux, devoirs réels ; les beaux discours sont dédaigner les belles actions, & la simplicité des bonnes mœurs, passe pour grossiereté.

Quel effet. produiront de pareils tableaux sur un Gentilhomme de campagne, qui voit railler la