Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t2.djvu/438

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ne suis pas un La Bruyere ; & je soutiens que, pour tout homme qui n’est pas dépourvu du goût des beaux-arts, la musique françoise, la danse & le merveilleux mêlés ensemble, feront toujours de l’Opéra de Paris le plus ennuyeux spectacle qui puisse exister. après tout, peut-être n’en faut-il pas aux François de plus parfaits, au moins quant à l’exécution : non qu’ils ne soient tres en état de connoître la bonne, mais parce qu’en ceci le mal les amuse plus que le bien. Ils aiment mieux railler qu’applaudir ; le plaisir de la critique les dédommage de l’ennui du spectacle ; & il leur est plus agréable de s’en moquer, quand ils n’y sont plus, que de s’y plaire tandis qu’ils y sont.

LETTRE XXIV. DE JULIE.

Oui, oui, je le vois bien, l’heureuse Julie t’est toujours chère. Ce même feu qui brilloit jadis dans tes yeux se fait sentir dans ta derniere lettre : j’y retrouve toute l’ardeur qui m’anime & la miennes’en irrite encore. Oui, mon ami, le sort a beau nous séparer, pressons nos cœurs l’un contre l’autre, conservons par la communication leur chaleur naturelle contre le froid de l’absence & du désespoir & que tout ce qui devroit relâcher notre attachement ne serve qu’à le resserrer sans cesse.

Mais admire ma simplicité ; depuis que j’ai reçu cette