Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t2.djvu/450

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m’avisai de la boire pure. Alors seulement je m’aperçus que cette eau prétendue étoit du vin blanc & que j’avois été trompé tout le long du repas. Je ne fis point des plaintes qui ne m’auroient attiré que des railleries, je cessai de boire, il n’étoit plus tems ; le mal étoit fait. L’ivresse ne tarda pas à m’ôter le peu de connoissance qui me restoit. Je fus surpris, en revenant à moi, de me trouver dans un cabinet reculé, entre les bras d’une de ces créatures & j’eus au même instant le désespoir de me sentir aussi coupable que je pouvois l’être.

J’ai fini ce récit affreux : qu’il ne souille plus tes regards ni ma mémoire. Ô toi dont j’attends mon jugement, j’implore ta rigueur, je la mérite. Quel que soit mon châtiment, il me sera moins cruel que le souvenir de mon crime.

LETTRE XXVII. DE JULIE.

Rassurez-vous sur la crainte de m’avoir irritée ; votre lettre m’adonné plus de douleur que de colere. Ce n’est pas moi, c’est vous que vous avez offensé par un désordre auquel le cœur n’eut point de part. Je n’en suis que plus affligée ; j’aimerois mieux vous voir m’outrager que vous avilir & le mal que vous vous faites est le seul que je ne puis vous pardonner.