Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t4.djvu/332

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mesurer au besoin [1]. En lui supposant une montre, aussi bien qu’en le faisant pleurer, je me donnois un émile vulgaire, pour être utile et me faire entendre ; car, quant au véritable, un enfant si différent des autres ne serviroit d’exemple à rien.

Il y a un ordre non moins naturel & lus judicieux encore, par lequel on considère les arts selon les rapports de nécessité qui les lient, mettant au premier rang les plus indépendants, & au dernier ceux qui dépendent d’un plus grand nombre d’autres cet ordre, qui fournit d’importantes considérations sur celui de la société générale, est semblable au précédent, & soumis au même renversement dans l’estime des hommes ; en sorte que l’emploi des matières premières se fait dans des métiers sans honneur, presque sans profit, & que plus elles changent de la main d’œuvre augmente de prix & devient honorable. Je n’examine pas s’il est vrai que l’industrie soit plus grande & mérite plus de récompense dans les arts minutieux qui donnent la dernière forme à ces matières, que dans le premier travail qui les convertit à l’usage des hommes : mais je dis qu’en chaque chose l’art dont l’usage est le plus général & le plus indispensable est incontestablement celui qui mérite le plus d’estime, & que celui à qui moins d’autres arts sont nécessaires, la mérite encore par-dessus les plus subordonnés,

  1. Le tems perd pour nous sa mesure, quand nos passions veulent régler son cours à leur gré. La montre du sage est l’égalité d’humeur & la paix de l’âme : il est toujours à son heure, & il la connoît toujours.