Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t5.djvu/213

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Il n’y a nulle parité entre les deux sexes quant à la conséquence du sexe. Le mâle n’est mâle qu’en certains instants, la femelle est femelle toute sa vie, ou du moins toute sa jeunesse ; tout la rappelle sans cesse à son sexe, &, pour en bien remplir les fonctions, il lui faut une constitution qui s’y rapporte. Il lui faut du ménagement durant sa grossesse ; il lui faut du repos dans ses couches ; il lui faut une vie molle & sédentaire pour allaiter ses enfants ; il lui faut, pour les élever, de la patience & de la douceur, un zèle, une affection que rien ne rebute ; elle sert de liaison entre eux & leur père, elle seule les lui fait aimer & lui donne la confiance de les appeler siens. Que de tendresse & de soin ne lui faut-il point pour maintenir dans l’union toute la famille ! & enfin tout cela ne doit pas être des vertus, mais des goûts, sans quoi l’espèce humaine seroit bientôt éteinte.

La rigidité des devoirs relatifs des deux sexes n’est ni ne peut être la même. Quand la femme se plaint là-dessus, de l’injuste inégalité qu’y met l’homme elle a tort ; cette inégalité n’est point une institution humaine ou du moins elle n’est point l’ouvrage du préjugé, mais de la raison : c’est a celui des deux que la nature a chargé du dépôt des enfants d’en répondre à l’autre. Sans doute il n’est permis à personne de violer sa foi, & tout mari infidèle qui prive sa femme du seul prix des austères devoirs de son sexe est un homme injuste & barbare ; mais la femme infidèle fait plus, elle dissout la famille & brise tous les liens de la nature ; en donnant à l’homme des enfants qui ne sont pas à lui, elle trahit les uns & les autres, elle joint la