Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t6.djvu/189

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TROISIEME LETTRE.


Je reprends, Monsieur, cette question des miracles que j’ai entrepris de discuter avec vous ; & après avoir prouvé qu’établir leur nécessité c’étoit détruire le Protestantisme, je vais chercher à présent quel est leur usage pour prouver la Révélation.

Les hommes ayant des têtes si diversement organisée ; ne sauroient être affectés tous également des mêmes argumens, sur-tout en matieres de foi. Ce qui paroît évident à l’un, ne paroît pas même probable à l’autre : l’un, par son tour d’esprit, n’est frappé que d’un genre de preuves ; l’autre ne l’est que d’un genre tout différent. Tous peuvent bien quelquefois convenir des mêmes choses, mais il est très-rare qu’ils en conviennent par les mêmes raisons : ce qui, pour le dire en passant, montre combien la dispute en elle-même est peu sensée : autant vaudroit vouloir forcer autrui de voir par nos yeux.

Lors donc que Dieu donne aux hommes une Révélation que tous sont obligés de croire, il faut qu’il l’établisse sur des preuves bonnes pour tous, & qui par conséquent soient aussi diverses que les manieres de voir de ceux qui doivent les adopter.

Sur ce raisonnement, qui me paroît juste & simple, on a trouvé que Dieu avoit donné à la mission de ses Envoyés divers caracteres qui rendoient cette mission reconnoissable