Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t6.djvu/264

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Lettres n’approuve pas qu’il soit aussi doux qu’elle, il doit au moins lui laisser toujours la distinction des cas ; car il n’est pas permis, de peur qu’un délinquant ne retombe, de le traiter d’avance comme s’il étoit déjà retombé.

C’est pourtant sur ces fausses conséquences que cet Auteur s’appuie pour affirmer que l’Edit, dans cet article, n’a pas eu pour objet de régler la procédure, & de fixer la compétence des Tribunaux. Qu’a donc voulut l’Edit, selon lui ? Le voici.

Il a voulu empêcher que le Consistoire ne sévît contre des gens auxquels on imputeroit ce qu’il n’auroient peut-être point dit, ou dont on auroit exagéré les écarts ; qu’il ne sévît, dis-je, contre ces gens-là sans en avoir conféré avec eux, sans avoir essayé de les gagner.

Mais qu’est-ce que sévir, de la part du Consistoire ? C’est excommunier, & déférer au Conseil. Ainsi, de peur que le Consistoire ne défere trop légerement un coupable au Conseil, l’Edit le livre tout-d’un-coup au Conseil. C’est une précaution d’une espece toute nouvelle. Cela est admirable que, dans le même cas, la Loi prenne tant de mesures pour empêcher le Consistoire de sévir précipitamment, & qu’elle n’en prenne aucune pour empêcher le Conseil de sévir précipitamment ; qu’elle porte une attention si scrupuleuse à prévenir la diffamation, & qu’elle n’en donne aucune à prévenir le supplice ; qu’elle pourvoye à tant de choses pour qu’un homme ne soit pas excommunié mal-à-propos, & qu’elle ne pourvoye à rien pour qu’il ne soit pas brûlé mal-à-propos ; qu’elle craigne si fort la rigueur des Ministres, & si peu celle des Juges ! C’étoit bien fait assurément