Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t6.djvu/32

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qu’on ne voit pas les Chrétiens moins enclins au mal que les infideles, au-lieu que, selon moi, la malice infuse du péché devroit se marquer dans ceux-ci par des différences sensibles. Avec les secours que vous avez dans la morale évangélique, outre le baptême ; tous les Chrétiens, poursuivroit-on, devroient être des Anges ; & les infideles, outre leur corruption originelle, livrés à leurs cultes erronés, devroient être des Démons. Je conçois que cette difficulté pressée pourroit devenir embarrassante : car que répondre à ceux qui me feroient voir que, relativement au genre-humain, l’effet de la rédemption faite à si haut prix, se réduit à-peu-près à rien ?

Mais, Monseigneur, outre que je ne crois point qu’en bonne Théologie on n’ait pas quelque expédient pour sortir de là ; quand je conviendrois que le baptême ne rémedie point à la corruption de notre nature, encore n’en auriez-vous pas raisonné plus solidement. Nous sommes, dites-vous, pécheurs à cause du péché de notre premier pere ; mais notre premier pere, pourquoi fut-il pécheur lui-même ? Pourquoi la même raison par laquelle vous expliquerez son péché ne seroit-elle pas applicable à ses descendants sans le péché originel ; &