Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t6.djvu/400

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Voilà, Monsieur, quel est le droit négatif du Roi d’Angleterre. Si vos Magistrats n’en réclament qu’un pareil, je vous conseille de ne le leur pas contester. Mais je ne vois point quel besoin, dans votre situation présente, ils peuvent jamais avoir de la puissance législative, ni ce qui peut les contraindre à la convoquer pour agir réellement, dans quelque cas que ce puisse être ; puisque de nouvelles Loix ne sont jamais nécessaires à gens qui sont au-dessus des Loix, qu’un Gouvernement qui subsiste avec ses finances, & n’a point de guerre, n’a nul besoin de nouveaux impôts, & qu’en revêtant le corps entier du pouvoir des chefs qu’on en tire, on rend le choix de ces chefs presque indifférent.

Je ne vois pas même en quoi pourroit les contenir le Législateur, qui, quand il existe, n’existe qu’un instant, & ne peut jamais décider que l’unique point sur lequel ils l’interrogent.

Il est vrai que le Roi d’Angleterre peut faire la guerre & la paix ; mais outre que cette puissance est plus apparente que réelle, du moins quant à la guerre, j’ai déjà fait voir ci-devant & dans le Contrat Social que ce n’est pas de cela qu’il s’agit pour vous, & qu’il faut renoncer aux droits honorifiques quand on veut jouir de la liberté. J’avoue encore que ce Prince peut donner & ôter les places au gré de ses vues, & corrompre en détail le Législateur. C’est précisément ce qui met tout l’avantage du côté du Conseil, à qui de pareils moyens sont peu nécessaires & qui vous enchaîne à moindres frais. La corruption est un abus de la liberté ; mais elle est une preuve que la liberté existe, & l’on n’a