Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t7.djvu/329

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n’attendoient qu’un homme qui voulût profiter de l’offre qu’ils avoient faite à Verginius. La Cité de Langres avoit ſelon l’ancien uſage envoyé aux Légions le préſent des mains enlacées, en ſigne d’hoſpitalité. Les députés affectant une contenance affligée commencerent à raconter de chambrée en chambrée les injures qu’ils recevoient & les graces qu’on faiſoit aux Cités voiſines ; puis, ſe voyant écoutés ils échauffoient les eſprits par l’énumération des mécontentemens donnés à l’armée & de ceux qu’elle avoit encore à craindre.

Enfin tout ſe préparant à la ſédition, Hordéonius renvoya les députes & les fit ſortir de nuit pour cacher leur départ. Mais cette précaution réuſſit mal, pluſieurs assurant qu’ils avoient été maſſacrés, & que, si l’on ne prenoit garde à ſoi, les plus braves ſoldats qui avoient oſé murmurer de ce qui se paſſoit ſeroient ainſi tués de nuit à l’inſu des autres. Là-deſſus les Légions s’étant liguées par un engagement ſecret, on fit venir les auxiliaires, qui d’abord donnerent de l’inquiétude aux cohortes & à la cavalerie qu’ils environnoient, & qui craignirent d’en être attaquées. Mais bientôt tous avec la même ardeur prirent le même parti ; mutins plus d’accord dans la révolte qu’ils ne furent dans leur devoir.

Cependant le premier Janvier les Légions de la Germanie inférieure prêterent ſolemnellement le ſerment de fidélité à Galba, mais à contre-cœur & ſeulement par la voix de quelques-uns dans les premiers rangs ; tous les autres gardoient le ſilence, chacun n’attendant que l’exemple de ſon voiſin,